Vaccins contre la Covid-19 : questions et réponses

Mise au point sur les vaccins de la Société de Pathologie Infectieuse

Le 29 décembre 2020

Vaccins contre la Covid-19 : questions et réponses
Un texte de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française à destination des soignants


A – Généralités .

1. Quel est le principe des vaccins contre la Covid-19 ? . Leur principe est de permettre au système immunitaire de déclencher une réponse immune spécifique contre le SARS-CoV-2 et de le neutraliser avant qu’il n’ait le temps de développer la maladie Covid-19 (ou d’en atténuer les conséquences). La majorité des vaccins en développement ciblent la protéine spike du virus (aussi appelée « protéine spicule » ou « protéine S »). Cette protéine est située à la surface de l’enveloppe du SARS-CoV-2 et lui permet de se fixer à un récepteur cellulaire puis de pénétrer dans les cellules : son rôle dans l’infection est donc central. Diverses études ont montré que déclencher des anticorps contre cette protéine permettait de protéger contre l’infection : elle est donc la cible de la plupart des vaccins développés en 2020.

2. Qu’est-ce qu’une « plateforme vaccinale ? » . « Plateforme vaccinale » signifie « technologie vaccinale », c’est-à-dire le type de vaccin. Il y a en effet plusieurs types de vaccins et plusieurs moyens de déclencher une réponse immunitaire protectrice.

3. Quels sont les différents types de vaccins contre la Covid-19 ? . Différentes technologies vaccinales sont utilisées comme vaccins contre la Covid-19.

Elles sont de 2 types :
• Les technologies classiques, basées sur l’utilisation d’un virus entier et inactivé, ici le SARS-CoV-2 (plusieurs vaccins développés par des consortiums chinois utilisent cette stratégie), ou basée sur l’utilisation d’une partie seulement du virus (le plus souvent une protéine, ici la protéine S) (ex : vaccins de Novavax et de Sanofi-GSK), associé à un adjuvant de l’immunité.
Les « nouvelles » technologies1, basées sur
- l’utilisation d’acide nucléique « pur » (ADN ou ARN), c’est à dire la séquence génétique d’une protéine-cible : ici la protéine S (ex : vaccins à ARN développés par Moderna-NIH et par Pfizer-BioNTech, et vaccins à ADN) ; ou
- l’utilisation d’un vecteur viral dans le génome duquel on a inséré le gène de la protéine-cible, ici la protéine S du SARS-CoV-2 (ex : vaccins développés par l’Université d’Oxford-AstraZeneca, Johnson & Johnson/Janssen, les vaccins de Merck-Institut Pasteur, le vaccin Spoutnik V de Gamaleya développé en Russie, le vaccin de CanSinoBio développé en Chine …).
(1) Bien qu’appelées nouvelles, ces plateformes sont en fait déjà anciennes car développées depuis plus de 20 ans, même si ces vaccins en développement n’avaient pas encore atteint le stade de l’autorisation de mise sur le marché
Version N°2 du 29 décembre 202

4-Qu’est-ce qu’un vaccin « à acide nucléique » ? .
Le composant principal des vaccins à base d’acide nucléique est de l’ADN (acide désoxyribonucléique) ou de l’ARN (acide ribonucléique) messager (ARNm). La molécule d’ADN ou d’ARNm code pour une protéine virale qui va être produite par nos cellules. La séquence d’ADN ou d’ARNm est synthétisée en laboratoire (et non extraite directement d’un virus). Elle est choisie car elle code pour la protéine d’intérêt et parce qu’une réponse immunitaire déclenchée contre cette protéine permet de protéger contre l’infection. Pour le vaccin SARS-CoV-2, il s’agit de la protéine S.

5. Comment fonctionnent les vaccins à ARN ? .
L’information génétique (les gènes) est codée par l’ADN de 46 chromosomes contenus dans le noyau de nos cellules. L’ADN est « transcrit » en ARN messager (ARNm), qui quitte le noyau et rejoint le cytoplasme, pour être « traduit » en protéine par le ribosome.
Lors de l’injection dans un muscle (en général le deltoïde, dans l’épaule) d’un vaccin à ARNm, l’ARNm vaccinal pénètre dans les cellules du muscle et sont traduits dans le cytoplasme en protéines (ici la protéine S). La protéine S ainsi produite est ensuite exprimée à la surface cellulaire, puis va être prise en charge par les cellules présentatrice d’antigènes. Cette expression et cette présentation vont déclencher la production d’anticorps neutralisants par les lymphocytes B, une réponse lymphocytaire T cytotoxique (permettant de détruire les cellules infectées par le SARS COv2), et la génération de lymphocytes T mémoire. En cas de rencontre ultérieure avec le coronavirus, ces cellules pourront reconnaître et combattre efficacement le SARS-CoV-2 avant qu’il ne développe une infection.

6. Les vaccins à ARN peuvent-ils modifier nos gènes ? .
Non. Lors de la synthèse protéique, l’information circule dans le sens ADN→ARN→protéine. Il n’y pas dans notre organisme d’enzyme permettant d’inverser ce sens. Ainsi, les vaccins ARNm ne peuvent pas modifier nos gènes (qui eux sont sous forme d’ADN).

7. L’ARN viral peut-il être transcrit par des rétrovirus endogènes ? .
Cette information circule sur internet mais elle est fausse. Les rétrovirus sont des virus à ARN capables de « transcrire à l’envers » leur ARN en ADN grâce à une enzyme très particulière qu’ils possèdent, la transcriptase inverse. C’est le cas par exemple du VIH (virus du Sida), qui peut retro-transcrire son ARN en ADN à l’aide de sa transcriptase inverse, puis l’intégrer dans le génome par l’intermédiaire d’une autre enzyme, l’intégrase. Notre génome contient des reliquats de virus qui avaient infecté nos lointains ancêtres, il y a des centaines de milliers d’années : on les appelle des rétrovirus endogènes. Ces séquences sont souvent considérées comme des fossiles : elles ne peuvent pas donner naissance à une transcriptase inverse ni à une intégrase. Il n’y a donc pas de possibilité que l’ARN des vaccins donne naissance à de séquences d’ADN et soit intégré dans le génome de la cellule hôte.

8. Et les vaccins à ADN : peuvent-ils modifier nos gènes ? .
Non. Dans les vaccins à ADN, l’acide nucléique est sous une forme circulaire fermée (plasmide) qui ne peut pas s’intégrer à l’ADN chromosomique. Par ailleurs, le vaccin ne contient pas l’enzyme (intégrase) qui permettrait cette intégration.

9. Pourquoi utiliser des « nanoparticules » pour véhiculer les ARN messagers vaccinaux ? .
L’ARNm vaccinal ne peut pas être injecté sous une forme « nue » car elle serait immédiatement dégradée, avant même de pénétrer dans une cellule. Pour lui permettre d’entrer dans le cytoplasme, l’ARNm doit être protégé au sein d’une enveloppe lipidique, dont la taille est inférieure à 0,1 μm, d’où le préfixe « nano » ; mais il ne s’agit pas des nanoparticules telles qu’elles ont pu être évoquées en science-fiction (nano-robots par exemple). La membrane de nos cellules est composée du même type de molécules. Une fois injectées, les nanoparticules peuvent fusionner avec la membrane de la cellule, et ainsi libérer l’ARNm pour qu’il puisse être traduit en protéine antigénique, qui va permettre de déclencher une réaction immunitaire.

10. Le polyéthylène glycol (PEG) contenu dans les nanoparticules lipidiques des vaccins à ARNm peut-il être toxique ? .
Les particules lipidiques (nanoparticules) qui contiennent l’ARNm sont composées de molécules de lipides parmi lesquelles le cholestérol et le PEG. Les molécules de PEG sont souvent utilisées dans l’industrie médicale du fait de leurs propriétés à la fois hydrosolubles et liposolubles. Le PEG est utilisé au quotidien en médecine par voie orale (macrogol) pour lutter contre la constipation. Il est également utilisé par voie injectable en combinaison avec certains principes actifs pour augmenter leur durée de vie de (interféron dit « PEGylé » dans le cadre du traitement des hépatites, facteurs de croissance hématopoïétique, anti-cancéreux etc.). Les réactions allergiques sont très rares mais elles sont possibles. Sur l’expérience accumulée dans d’autres médicaments, les agences d’enregistrement considèrent que PEG et nanoparticules lipidiques sont bien tolérées. Il est probable que les réactions anaphylactiques observées avec le vaccin Pfizer BioNtech soit liées à des anticorps anti-PEG préexistants.

11. Quel recul a-t-on sur la technologie des vaccins à acide nucléique ? .
Il n'existait jusqu’à aujourd’hui aucun vaccin à ARNm homologué. Cependant, les chercheurs y travaillent depuis plus de 20 ans. Cette technologie a fait l’objet d’améliorations continues, qui ont largement contribué à sa sûreté. Des vaccins à ARNm ont été testés chez l’être humain contre le virus Zika, les virus de la grippe et de la rage, et le cytomégalovirus, avec de l’ordre de 600 participants inclus dans ces essais.
C’est également le cas pour les vaccins à ADN qui ont montré des résultats prometteurs chez l’animal et dont les essais cliniques, chez l’humain, avaient déjà commencé avant le développement des vaccins à ADN contre le SARS-CoV-2. Quatre vaccins à ADN ont par ailleurs reçu les autorisations règlementaires nécessaires à leur exploitation commerciale pour protéger plusieurs espèces animales contre des maladies virales ou traiter le mélanome du chien.

12. Quels sont les avantages des vaccins à acide nucléique ? .
Ils sont très faciles et rapides à produire. La synthèse est faite en laboratoire sans avoir besoin de manipuler le virus. De plus, une fois le vaccin injecté, la protéine d’intérêt est produite dans nos cellules de façon naturelle ; elle prend donc la conformation (la forme) qu’elle a habituellement et induit une réponse immunitaire complète (anticorps et lymphocytaire T). C’est un avantage par rapport aux vaccins inactivés ou sous-unitaires, et qui induisent une réponse immunitaire uniquement de type anticorps.

13. Quelle est l’efficacité des vaccins à ARNm de Pfizer-BioNTech et de Moderna ? .
Les preuves d’efficacité de ces vaccins proviennent de deux vastes essais cliniques de phase 3 randomisés, en double aveugle et avec un groupe placebo, c’est-à-dire procurant le plus haut niveau de preuve scientifique. Ces deux essais (l’un de 43000 participants environ, l’autre de 30000 participants environs) montrent une efficacité de 94%. Concrètement, pour le vaccin Pfizer-BioNTech, les résultats ont porté sur 170 cas de Covid-19 symptomatiques : 8 cas sont survenus dans le groupe des volontaires vaccinés contre 162 cas dans le groupe placebo ; pour le vaccin Moderna, sur 196 cas de Covid-19 symptomatiques, 11 sont survenus dans le groupe des volontaires vaccinés contre 185 cas dans le groupe placebo. Cette efficacité ne variait pas dans différentes les catégories d'âge et de sexe, et chez les personnes souffrant de problèmes médicaux sous-jacents, ainsi que chez les participants ayant eu une infection antérieure par le SARS-CoV-2 (ceux qui avaient une sérologie positive à l’inclusion) ; d’autres résultats permettront de préciser encore davantage si cette efficacité varie dans différents groupes de personnes.

14. Quels sont les effets secondaires les plus fréquents des vaccins à ARNm ? .
La grande majorité des effets secondaires observés lors des essais cliniques se manifestent le lendemain de la vaccination et durent habituellement moins de 3 jours. Ils sont classiques et relativement attendus et fréquents : rougeur au point d’injection, fatigue, maux de tête, douleurs musculaires, frissons ou fièvre. C’est ce que l’on appelle la « réactogénicité ». Les effets généraux sont plus fréquents après la 2ème dose de vaccin et chez les personnes plus jeunes. Ils sont le plus souvent légers à modérés et durent en moyenne 2 à 3 jours. Comme pour toute autre vaccination, les personnes vaccinées doivent être averties de la possibilité de survenue de tels effets. La prise de paracétamol est possible, mais elle n’est pour le moment pas recommandée de manière préventive.
Notons que, dans le groupe placebo, 23 % des sujets ayant reçu le placebo (une solution d’eau salée) ont rapporté des maux de tête (contre 59 % dans le groupe vacciné) et 23 % ont rapporté une fatigue (contre 65 % dans le groupe vacciné) dans les 7 jours suivant la 2ème dose dans l’essai clinique de Moderna.
Notons enfin la survenue d’adénopathie(s) axillaire(s) plus fréquente(s) dans le groupe des volontaires vaccinés (0,3 et 1,1 % dans les essais de Pfizer-BioNTech et Moderna respectivement) que parmi ceux ayant reçu le placebo.

15. Peut-il y avoir des effets indésirables graves avec les vaccins à ARNm ? .
Il faut distinguer les « événements » indésirables graves, dont on ne sait pas s’ils ont un lien avec le vaccin, des « effets » indésirables pour lesquels on pense qu’il y a un lien de cause à effet entre le vaccin et la survenue du problème médical (et pas seulement un lien chronologique).
Dans l’essai de phase 2/3 du vaccin de Pfizer-BioNTech, la fréquence des événements indésirables graves n’est pas supérieure dans le groupe « vaccin » par rapport au groupe « placebo » (0,6 % dans le groupe des vaccinés, 0,5 % dans le groupe ayant reçu le placebo). C’est la même chose dans l’essai Moderna (1 % dans les deux groupes). La plupart de ces événements ont été considérés par les investigateurs comme non liés au vaccin (appendicites, cholécystites, infarctus du myocarde, accidents vasculaires cérébraux etc.).
De très rares événements graves ont par contre été considérés par les investigateurs comme liés à la vaccination. Dans l’essai de Pfizer-BioNTech, il s’agissait d’une lésion à l’épaule (par injection par erreur du vaccin en intra-articulaire ?), une arythmie ventriculaire pendant 8 jours, et une adénomégalie axillaire (sur les 19 000 participants ayant reçu le vaccin). Aucune réaction anaphylactique grave n’a été rapportée à la vaccination dans les essais de Pfizer-BioNTech et Moderna, mais les personnes ayant des antecedents allergiques graves ne sont pas inclus dans les essais.
Hors essais cliniques, plusieurs cas de « réactions allergiques graves immédiates » ont été rapportés dans la presse depuis le début des campagnes de vaccination en Grande Bretagne ; certaines des personnes concernées étaient déjà connues pour avoir un terrain d’allergie. Aux États-Unis, les CDC ont identifié 6 cas d’anaphylaxie d’évolution favorable au 18/12/2020 pour 272 000 doses administrées. L’accident anaphylactique s’est résolu chez toutes ces personnes.
Les données accumulées sont donc rassurantes et le rapport bénéfice/risque est très nettement en faveur de la vaccination pour les populations chez lesquelles elle est recommandée. Il faut rappeler que le taux de létalité de l’infection à SARS-CoV-2 est estimé à 0,5-1,4 %. Dans l’essai clinique de Moderna par exemple, il y a eu 30 cas de Covid-19 graves dans le groupe placebo (sur 162 cas de Covid-19 symptomatiques, et 15 000 sujets inclus dans le groupe placebo, dont 1 décès et 2 hospitalisations en réanimation) contre aucun dans le groupe vacciné.

16. Les vaccins à ARNm sont-ils responsables de paralysie faciale ? .
Plusieurs cas de paralysie faciale ont été rapportés dans les essais cliniques de Pfizer-BioNTech et Moderna. Dans le 1er, il y a eu 4 cas de paralysie faciale dans le groupe des participants vaccinés, dont 2 attribués au vaccin, contre aucun dans le groupe placebo. Dans l’essai de Moderna, il y a eu 3 cas dans le groupe vacciné et 1 dans le groupe placebo. La fréquence de survenue de paralysie faciale parmi les volontaires vaccinés est proche de ce qui est attendu en population générale (15 à 30 pour 100 000 personnes). Il n’y a donc pas de signal en faveur d’un tel effet indésirable après vaccination, mais ces évènements feront l’objet d’une surveillance particulière.

17. Les vaccins à acides nucléiques peuvent-ils induire des poussées de maladies auto-immunes ? .
Les vaccins à ARNm (et les vaccins vectorisés viraux) induisent un « signal d’alerte », améliorant la réponse immunitaire. Les cytokines et les interférons pro-inflammatoires ainsi présents dans l’environnement sont propices au recrutement et à l’activation adéquate des cellules immunitaires contre l’agent pathogène. Il existe l’hypothèse selon laquelle cette réponse inflammatoire pourrait être délétère chez certains individus ayant un terrain les prédisposant aux réactions inflammatoires, voire aux maladies auto-immunes. A ce jour, ce risque n’est que théorique et cela n’a jamais été observé avec aucun vaccin. L’ARNm du vaccin est composé de nucléotides légèrement différents des nucléotides naturels (pseudo-uridines), afin d’atténuer ce phénomène, et pour qu'il n'aboutisse pas à la destruction de l'ARNm avant qu'il n'ait eu le temps d'être traduit. Dans l’essai clinique de phase 2/3 de Pfizer/BioNTech, un antécédent de maladie dysimmunitaire n’était pas un critère d’exclusion, à la condition qu’elle ne fût pas instable. Avec un suivi médian de 2 mois après la 2ème dose vaccinale, il n’y a pas eu de signal de poussées de maladie dysimmunitaire.

18. Les personnes atteintes d’une maladie auto-immune ou dysimmunitaire peuvent-elles recevoir un vaccin à ARNm ? .
Aucune maladie auto-immune ou dysimmunitaire n’est une contre-indication à un vaccin inerte (contrairement aux vaccins vivants qui peuvent déclencher une infection vaccinale si un traitement immunosuppresseur est en cours). Le fait de présenter une maladie auto-immune ou dysimmunitaire ne devrait donc pas être un critère de contre-indication stricte à la réalisation d’un vaccin Covid-19 non vivant. Il paraît par contre raisonnable de décaler la vaccination chez les individus en poussée de leur maladie auto-immune.

C – Les vaccins utilisant un vecteur viral .

19. Que sont les vaccins à vecteurs viraux ? .
Cette technologie a été largement explorée depuis une trentaine d’année dans 2 domaines : la vaccination anti-cancer et la vaccination anti-infectieuse. On utilise dans ce type de vaccin un virus non pathogène pour déclencher une réponse immunitaire contre la maladie d’intérêt. Le virus utilisé est appelé « vecteur viral » : il s’agit de virus atténués, ou naturellement non pathogènes pour l’homme ; ils ne peuvent pas provoquer de maladie. On a modifié leur génome en y insérant la séquence d’ADN ou d’ARN de la protéine d’intérêt, ici la protéine S du SARS-CoV-2. Une fois que le vecteur viral est injecté, il infecte des cellules de l’hôte, et leur délivre son ADN ou ARN ; la machinerie de la cellule exprime alors la protéine vaccinale, qui va être prise en charge par les cellules présentatrice d’antigènes et va activer les lymphocytes T et B. De nombreux virus différents ont été développés comme vecteurs et peuvent être classés en deux grandes catégories : les vecteurs viraux non réplicatifs et les vecteurs viraux capables de réplication. Les adénovirus humains et non humains sont les virus le plus utilisés dans les vaccins vectorisés viraux non réplicatifs. Ce sont des virus communs responsables de légers symptômes de type rhume ou grippe. Les candidats vaccins développés par l'Université d'Oxford-AstraZeneca, et par Johnson & Johnson reposent sur un adénovirus (adénovirus du chimpanzé pour le vaccin d’Oxford, adénovirus humain pour le vaccin de J&J). C’est aussi le cas du candidat vaccin Spoutnik V développé en Russie et du vaccin Casinobio développé en Chine (adénovirus humain). Parce que ces vecteurs adénoviraux sont volontairement porteurs d’un défaut de réplication, une fois que le virus a infecté une cellule, aucun autre virus n'est produit. Le vaccin développé par Merck est un exemple de vaccin vectorisé viral réplicatif. Il utilise le virus de la stomatite vésiculeuse (VSV). Chez l'homme, ce virus est généralement asymptomatique ou provoque une légère maladie de type grippal. Les chercheurs ont remplacé une partie de sa séquence d'ARN par de l'ARN codant pour la protéine S du SARS-CoV-2. Après qu’il a infecté une cellule hôte, la machinerie de la cellule fabrique la protéine S, qui est ensuite exprimée par la cellule ; le virus vaccinal étant compétent pour la réplication, celui-ci va donc à son tour infecter d’autre cellules, et ainsi de suite. Cette technologie imite donc plus fidèlement une véritable infection virale. Ces vecteurs réplicatifs ne peuvent être utilisés chez les immunodéprimés

20. Quel recul a-t-on avec les vaccins vectorisés viraux ? .
Leur développement remonte aux années 1980. Le vaccin contre la dengue (Dengvaxia) utilise ainsi la souche vaccinale du virus de la fièvre jaune exprimant les gènes de structure de chacun des quatre virus de la dengue. Récemment, Merck a utilisé cette technologie et le virus de la stomatite vésiculeuse (VSV) pour développer un vaccin contre le virus Ebola (Ervebo), qui a été approuvé par la FDA et l’EMA et a permis de vacciner des dizaines de milliers de personnes. D’autres vaccins de ce type sont en cours de développement : vaccins contre le chikungunya, le Zika, la fièvre du Nil… Le candidat vaccin Covid-19 de Janssen s'appuie quant à lui sur la plateforme technologique AdVac (adénovirus et virus MVA), qui a également été utilisée pour développer et fabriquer leur vaccin Ebola combiné (Zabdeno et Mvabea), approuvé par la Commission européenne, et construire ses candidats vaccins Zika, VRS et VIH. Cette plateforme technologique AdVac a été utilisée pour vacciner plus de 100 000 personnes à ce jour dans le cadre des programmes de vaccins expérimentaux de Janssen.

21. Quelle est l’efficacité des vaccins vectorisés viraux développés contre la Covid-19 ? .
Comme les vaccins à ARNm, ces vaccins ont des propriétés immunogènes intéressantes. En effet, les particules virales - indépendamment des protéines qu’elles expriment et de l’information génomique qu’elles transportent - sont reconnues par le système immunitaire comme un signal d’alerte. Cela permet la constitution d’une réponse immunitaire humorale (anticorps) et cellulaire. Les données d’efficacité clinique ne sont connues que pour le vaccin adénoviral d’AstraZeneca - Université d’Oxford sur 11 636 participants et 131 cas confirmés de Covid-19, l’efficacité tous schémas posologiques confondus est estimée à 70 % (90 % pour le schéma demi-dose suivie d’une dose complète, 62% pour le schéma a 2 doses, espacées de 4 semaines).

22. Comment se fait-il que le schéma à moindres doses du vaccin d’AstraZeneca-Université d’Oxford soit plus efficace que le schéma à doses pleines ? .
Les infections par adénovirus étant très courantes chez l’homme, les vaccins basés sur ce vecteur ont l’inconvénient de rencontrer une immunité parfois déjà installée, capable d’amoindrir l’effet du vaccin. C’est peut-être pour cela que l’utilisation lors de la 1ère injection vaccinale d’une demi-dose est associée à une meilleure efficacité du vaccin, par un effet antagonisme moins marqué qu’avec une pleine dose. C’est aussi pour cela que le vaccin développé en Russie, Spoutnik, utilise 2 adénovirus différents pour les 2 injections vaccinales. AstraZeneca a d’ailleurs annoncé le lancement d'un essai clinique combinant son vaccin avec le Spoutnik V d’ici la fin de l’année 2020.

D – Divers .

23. L’élaboration des vaccins contre la Covid-19 est particulièrement rapide. Des étapes normales dans l’élaboration des vaccins ont-elles été contournées ? .
• L’immunité anti-coronavirus
L’immunité contre les coronavirus avait beaucoup été étudiée à l’occasion des alertes précédentes (l’émergence du SARS-CoV en Asie en 2003, et l’émergence du MERS-CoV en Arabie Saoudite en 2012). On savait donc qu’il était généralement suffisant de déclencher une réponse contre la protéine S pour obtenir une protection. Pour le SARS-CoV-2, la séquence de la protéine S a été rendue publique par les scientifiques chinois dès janvier 2020. La production d’ARN correspondant à cette séquence a pu se faire quasiment immédiatement, et beaucoup plus rapidement que la production de protéines ou la culture de virus. Les essais rapidement menés chez l’animal ont confirmé qu’il était assez simple de déclencher une réponse immunitaire efficace contre le SARS-CoV-2. Cela contraste avec le fait que, par exemple, il est très difficile d’obtenir une réponse efficace contre l’agent du paludisme, et qu’on ne parvient toujours pas à élaborer un vaccin contre le VIH, malgré des décennies de recherche.

• Les plates-formes vaccinales
Avant l'arrivée de la pandémie de Covid-19, les plateformes de vaccination de type acide nucléique (ADN, ARN) avaient déjà été largement étudiée contre le virus Zika, le virus de la rage et le VIH, mais aussi contre les coronavirus SARS-CoV-1 et MERS-CoV sur des modèles animaux et dans des essais cliniques de phase 1 et 2. Ce sont donc des années de travail gagnées sur l’élaboration d’un vaccin contre le SARS-CoV-2. Elles avaient été identifiées comme des approches particulièrement intéressantes en cas de maladie infectieuse émergente car elles permettent de construire très rapidement le candidat vaccin après identification de l’agent infectieux en cause.

• Un effort scientifique et financier sans précédent
L’existence de ces nouvelles plateformes ne permet pas de gagner de temps sur les essais cliniques eux-mêmes, qui évaluent l’innocuité et l’efficacité des candidats vaccins ; mais dans le cadre de la pandémie, les différentes étapes se sont très rapidement succédées dès que les premiers résultats ont été obtenus. Par ailleurs, sans être dégradés, les processus de vérification des vaccins ont été considérablement accélérés. Comme la FDA, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a créé des procédures pour évaluer rapidement les vaccins en développement sans pour autant déroger à la rigueur scientifique. Par exemple, la “rolling review” consiste à analyser les données fournies par les laboratoires toutes les deux semaines, permettant de réduire la durée du processus. Quelle que soit l'approche vaccinale, les vaccins ne seront autorisés que lorsque les autorités indépendantes confirment leur qualité, leur sécurité et leur efficacité. Enfin, une force de frappe jamais égalée a été déployée en réponse à la pandémie de Covid-19 : la mobilisation des équipes de recherche et des Etats et la création de partenariats public-privé ont facilité et accéléré le développement, la fabrication (anticipation du développement industriel) et la distribution des vaccins. Le programme interinstitutionnel américain "Warp Speed" ("la vitesse de l'éclair") a par exemple permis le financement de plusieurs entreprises
pour le développement de plusieurs vaccins basés sur les nouvelles technologies. Autre exemple, « COVAX » est la partie « vaccins » d’une collaboration mondiale visant à accélérer la mise au point et la production de produits de diagnostic, de traitements et de vaccins contre la Covid-19 et à en assurer un accès équitable.

24. Une fois le vaccin approuvé par l’Agence européenne du médicament, la surveillance des événements indésirables va-t-elle s’arrêter ? .
Non, au contraire elle va s’intensifier sur la base de l’observation des personnes vaccinées.
La surveillance des effets indésirables est en place dans les pays qui ont déjà commencé à vacciner comme les États-Unis (plus de 600 000 doses administrées au 22 décembre 2020) et le Royaume-Uni. La surveillance aura aussi lieu en Europe et en France grâce au système d’information et de suivi de la vaccination qui sera mis en place et qui permettra aussi de tracer qui a été vacciné et avec quel lot de vaccin.
A l’heure actuelle, il existe un risque théorique que des effets indésirables très rares, de l’ordre de 1 sur 100 000, non observés au cours des essais cliniques, puissent être observés pendant la campagne de vaccination. Tous les événements suspects après vaccination devront donc être recensés par un suivi en pharmacovigilance renforcée, comme pour n’importe quel médicament.
Il faut bien sûr s’attendre à ce que des maladies habituelles (infarctus, accident vasculaire cérébral, etc.) surviennent après la vaccination comme elles seraient survenues sans vaccination. C’est le système de pharmacovigilance qui permettra de déterminer si de tels évènements doivent être attribués au vaccin ou au hasard.

25. Quelle est la durée de surveillance nécessaire pour établir la sécurité d'un vaccin ? .
Dans toute l’expérience accumulé en vaccinologie, les effets secondaires des vaccins surviennent dans les quelques jours, et au maximum dans les 6 semaines suivant la vaccination. Par précaution, on allonge la durée de surveillance jusqu’à 6 mois, bien qu’il soit très improbable que des évènements surviennent après une telle durée.
Un plan de gestion des évènements graves aura lieu pour les vaccins contre la Covid-19, et tout effet indésirable pourra faire l’objet d’une indemnisation par l’ONIAM même s’il n’est pas directement lié au vaccin.
Il faut noter qu’au 25 décembre 2020, plus de 1 200 000 personnes au Royaume-Uni et plus de 600 000 personnes aux États-Unis d’Amérique ont reçu une dose de vaccin à ARN ; aucun effet précoce plus rare, non vu en phase 3, n’a été rapporté, à l’exception de quelques cas de réactions anaphylactiques ou anaphylactoïdes.

26. Les vaccins Covid-19 peuvent-ils rendre les femmes stériles ? .
Non, les vaccins anti-infectieux ne peuvent pas rendre les femmes stériles. Il n’y a aucune possibilité qu’un virus à ARN codant pour une protéine virale puisse entrainer la production d’anticorps contre des protéines humaines (comme la syncitine-1 certains l’avaient évoqué).

27. Les vaccins anti-Covid-19 contiennent-ils des adjuvants ? .
Les vaccins à ARNm et les vaccins reposant sur des vecteurs viraux ne contiennent pas d’adjuvant, leur structure même permettant de stimuler le système immunitaire inné. Les vaccins qui nécessitent l’utilisation d’adjuvant sont les vaccins inactivés et les vaccins protéiques.

28. Pourquoi les essais cliniques de certains vaccins ont-ils été interrompus ? .
À chaque fois qu’un doute est survenu sur un possible effet indésirable d’un vaccin, les essais ont été mis en pause. Dans les différents cas, un comité indépendant a analysé les données et permis la reprise des essais en l’absence de preuve reliant la maladie au candidat vaccin. Ainsi, les essais sur le vaccin AZD1222, développé par AstraZeneca et l’université d’Oxford ont été mis en pause le 06/09/2020 à la suite d’une myélite apparue chez l’un des participants au Royaume Uni. Ils ont été repris après qu’un comité indépendant de neurologues a conclu qu’il s’agissait d’une myélite idiopathique et que les agences de régulation indépendantes ont donné leur accord. Le groupe J&J a quant à lui suspendu le développement clinique de son candidat vaccin AD26.COV2-S le 12/10/2020 pour cause de maladie inexpliquée chez l’un des participants. Conformément au protocole clinique, l’événement indésirable a fait l’objet d’une évaluation par le comité indépendant de surveillance des données de sécurité. La reprise des essais a été recommandée en l’absence de preuve reliant la maladie au candidat vaccin.

29. Les femmes enceintes pourront-elles se faire vacciner ? .
Se basant sur le fonctionnement des vaccins à ARNm, les experts estiment qu'il est très peu probable que ces vaccins présentent un risque pour les femmes enceintes. Les premières études de tératogénicité sur les animaux montrent l’absence d’effet sur le développement embryonnaire et foetal et l’absence d’effet sur la reproduction ; des études sur les femmes enceintes sont prévues. Dans les essais cliniques des vaccins à ARNm de Pfizer-BioNTech et Moderna, 23 et 13 grossesses inattendues ont eu lieu respectivement, autant dans le groupe des participants vaccinés que dans le groupe recevant le placebo. Aucun événement indésirable n’est survenu chez les femmes enceintes. En attendant les résultats des études, la vaccination n’est néanmoins pas proposée aux femmes enceintes sauf si les bénéfices l’emportent sur les risques potentiels pour la mère et le foetus.

30. Les traitements immunosuppresseurs risquent-ils d’avoir un impact négatif sur l’efficacité des vaccins Covid-19 ? .
Oui, la plupart des immunodépressions et des traitements immunosuppresseurs risquent d’impacter négativement l’efficacité du vaccin à la fois pour les réponses immunitaires humorale (anticorps) et cellulaire (lymphocytes T). La description de Covid-19 chroniques chez des patients souffrant de déficit immunitaire humoral ou recevant du rituximab suggère que la réponse humorale est probablement indispensable au contrôle de l’infection virale. On peut craindre que ces mêmes patients acquièrent une immunité acquise post-vaccinale insuffisante. Par contre, il semble que l’immunosénescence (c’est à dire le vieillissement du système immunitaire) impacterait peu l’efficacité des vaccins à ARNm et des vaccins vectorisés viraux.

31. Pour quelles autres populations la vaccination Covid-19 représente-t-elle un risque particulier (hors allergies) ? .
Enfants. Les vaccins de Pfizer-BioNTech, Moderna et AstraZeneca n’ont pas été testés en population pédiatrique. La vaccination n’est donc pas indiquée dans cette population. Sujets présentant des facteurs de risque de Covid grave (diabète, obésité, âge élevé). Les essais cliniques de phase 2/3 des vaccins à ARN n’ont pas montré d’effets indésirables dans ces populations. Ils n’ont cependant pas inclus de personnes très âgées (plus de 85 ans). Immunodéprimés. Dans les essais de phase 2/3 de Pfizer-BioNTech, environ 4 % des volontaires ayant reçu le vaccin avaient un antécédent d’infection par le VIH (sans que cette infection ne soit forcément accompagnée d’une immunodépression) ou de maladie cancéreuse ou hématologique, stables. Les données spécifiques à ce groupe ne sont pas encore disponibles. Il n’y a pas de rationnel pour penser que l’immunodépression puisse favoriser la survenue d’effets indésirables, la problématique étant plutôt celle d’une perte d’efficacité du vaccin. On peut donc vacciner ces personnes avec les vaccins à ARN. Dans l’essai de phase 3 du vaccin adénoviral d’AstraZeneca/Université d’Oxford, l’immunodépression était par contre un critère d’exclusion. Il ne l’est pas pour le vaccin adénoviral de Janssen dont nous attendons les premiers résultats au 1er trimestre 2021.

32. Les personnes allergiques peuvent-elles se faire vacciner avec le vaccin à ARNm de Pfizer-BioNTech ? .
L’HAS recommande d’éviter le vaccin chez les personnes présentant des antécédents d’allergies graves de type anaphylactique (réaction rapide et grave avec atteinte respiratoire ou digestive), dans l’attente de données complémentaires.
Par ailleurs, La vaccination est contre-indiquée aux personnes ayant des antécédents d’allergie sévère à l’un des composants du vaccin.
Les réactions allergiques qui ne relèvent pas de l’anaphylaxie (dans le cadre, par exemple, d’allergies aux animaux de compagnie, au venin, au pollen, au latex, aux autres médicaments) ne constituent pas une contre-indication à la vaccination par le vaccin Pfizer-BioNTech Covid-19. La Fédération française d'allergologie a également précisé que « les antécédents d’allergie ou d’anaphylaxie ne constituent en aucun cas une contre-indication systématique à cette vaccination ».
En pratique, l'administration du vaccin Pfizer-BioNTech doit avoir lieu dans un établissement capable de gérer une réaction d’hypersensibilité immédiate grave. Les personnes vaccinées doivent être observées pendant 15 minutes. En cas de réaction anaphylactique après la 1e dose, la 2e est contre-indiquée.

33. Les vaccins peuvent-ils augmenter le risque de forme grave de Covid-19 ? .
Il n’y a pas de risque avéré en ce sens. Lors de certaines infections, la présence d’une immunité préexistante à l’infection (d’origine vaccinale ou non) peut favoriser des formes graves de cette infection : soit parce que les anticorps préexistants facilitent l’infection de cellules de l’immunité (macrophages en particulier), soit parce que ces anticorps favorisent une réaction inflammatoire délétère. Un phénomène d’anticorps dits facilitants existe, par exemple, avec la dengue. En effet, les personnes vaccinées ont moins de risque de faire une dengue, mais si elles en font une, le risque de dengue grave est plus élevé. Ce risque existe par ailleurs hors vaccination, une infection par l’un des 4 sérotypes de la dengue exposant à un risque plus élevé de dengue grave en cas d’infection ultérieure par l’un des 3 autres. Un phénomène d’augmentation délétère de la réaction inflammatoire a été observé dans plusieurs modèles animaux d’infection par le SARS-CoV-1, et après un vaccin MERS-CoV chez l’animal ; à l’inverse, pour aucune le SARS-CoV-2, aucune donnée in vitro ou in vivo dans les modèles animaux d’infection par ou dans les essais cliniques vaccinaux ne corrobore cette hypothèse. Comme d’autres effets hypothétiquement possibles, cela est surveillé dans le cadre de la pharmacovigilance en vie réelle (phase 4).

34. Y a-t-il un danger et faut-il vacciner quelqu’un qui déjà eu la COVID-19 ou qui a été infecté par le SARS-CoV-2 sans le savoir ? .
En ce qui concerne le risque d’une vaccination d’une personne ayant déjà eu une infection apr le SARS-CoV-2, les essais cliniques de phase 3 de Pfizer-BioNTech et Moderna ne comportent pas de données suffisantes à ce sujet (des personnes dont la sérologie témoignaient d‘une infection antérieure ont été incluses, mais elles étaient peu nombreuses). Le risque même théorique chez ces personnes apparait cependant très faible.
En ce qui concerne l’intérêt ou non de la vaccination de ces personnes, on dispose actuellement de trop peu de recul sur l’infection. Les durées de protection conférées par l’infection versus par le vaccin sont des paramètres que l’on ne peut qu’extrapoler.
La HAS n’a pas prévu la vaccination systématique des personnes ayant un antécédent de Covid-19 symptomatique mais les personnes ayant un tel antécédent pourront être vaccinées si elles le souhaitent. La vaccination peut être réalisée sans tenir compte des antécédents d'infection asymptomatique par le SARS-CoV-2, et il n'est pas recommandé d’effectuer un test viral ou une sérologie à la recherche d’une infection en cours ou antérieure par le SARS-CoV-2.

35. Quel délai respecter entre un antécédent de Covid-19 et la vaccination ? .
Il apparait que la réinfection est très peu fréquente dans les 90 jours suivant l'infection initiale ; on recommande donc que les personnes ayant une infection aiguë documentée par le SARS-CoV-2 soient vaccinées après ce délai de 90 jours.

36. Quel délai respecter entre les 2 injections du vaccin Pfizer-BioNTech ? .
Le schéma vaccinal comporte 2 doses (30 μg, 0,3 ml chacune) administrées par voie intramusculaire, à 3 semaines d'intervalle. La 2ème dose peut être administrée entre le 17ème et le 21ème jour. Si par erreur elle était faite avant le 17ème jour, il ne serait néanmoins pas nécessaire de la répéter. Si plus de 21 jours se sont écoulés depuis la première dose, la deuxième dose doit être administrée dès que possible, mais il n’y a pas besoin de faire en tout plus que 2 doses.

37. Quel délai respecter entre le vaccin Pfizer-BioNTech et un autre vaccin ? .
Un intervalle minimal de 14 jours est recommandé entre un vaccin contre le coronavirus et un autre vaccin. Sile vaccin Covid-19 de Pfizer-BioNTech est administré par inadvertance dans les 14 jours suivant l'administration d'un autre vaccin, il n'est pas nécessaire de faire de dose supplémentaire pour l'un ou l'autre vaccin par rapport au schéma prévu.

38. Quel délai respecter entre un traitement contre la Covid-19 par anticorps passifs ou plasma de convalescent et la vaccination ? . Actuellement, il n'existe pas de données de vaccination chez les personnes ayant reçu des anticorps monoclonaux ou du plasma en convalescents dans le cadre du traitement Covid-19. Sur la base de la demi-vie estimée de ces traitements et les observations suggérant que la réinfection est peu fréquente dans les 90 jours suivant l'infection initiale, on recommande de différer la vaccination d’au moins 90 jours.

39. Les vaccins sont-ils efficaces contre les infections asymptomatiques ? .
Les essais cliniques de phase 3 des vaccins à ARN approuvés ont été élaborés afin de démontrer une efficacité contre la maladie Covid-19 symptomatique, la recherche d’infection n’étant réalisée qu’en cas de symptômes. Si les premiers résultats sont en faveur d’une excellente efficacité contre les épisodes symptomatiques de Covid-19 et contre les formes graves de la Covid-19, il n’y a pas encore de résultats concernant la protection contre l’infection asymptomatique par le SARS-CoV-2 ou sa transmissibilité. Par contre, dans l’essai clinique du vaccin d’AstraZeneca utilisant le vecteur cHAdOX1, une partie des participants effectuaient un prélèvement hebdomadaire systématique pour détecter les infections asymptomatiques ; le schéma avec une demi-dose vaccinale lors de la 1ère injection protégeait à 58% contre les infections asymptomatiques ; celui avec une pleine dose vaccinale lors de la 1ère injection n’apportait pas de protection en ce sens.

40. En atteignant un certain seuil de couverture vaccinale, limitera-t-on la circulation de la maladie ? .
Au cours des premières phases de la campagne de vaccination, l’objectif est de protéger les personnes à risque de complications pour éviter les décès et les hospitalisations. Si l’on démontre que la vaccination Covid-19 est stérilisante, c’est-à-dire efficace contre l’infection virale (et pas seulement la maladie) et contre la transmissibilité du virus, il sera alors intéressant d’atteindre un certain seuil de couverture vaccinale afin de favoriser l’immunité de groupe, et ainsi protéger indirectement les personnes qui ne peuvent pas être vaccinées, voire permettre l’interruption de l’épidémie.

41. Les mutations impactent-elles l’efficacité des vaccins ? .
Ce n’est pas le cas avec une année de recul. La protéine S (spicule) qui permet l’entrée du virus dans les cellules humaines peut comme les autres protéines virales être affectée par des mutations. Si les mutations touchent sa capacité à être reconnue par le système immunitaire, l’efficacité des vaccins actuellement développés pourrait être touchée. Des systèmes de surveillance internationaux sont en place pour repérer si de telles mutations se produisaient.

42. Devra-t-on se faire vacciner tous les ans comme pour la grippe ? .
Il est possible que la Covid-19 devienne une maladie à recrudescence saisonnière comme la grippe, ce qui pourrait justifier l’obtention d’une immunité à long terme. Si le vaccin ne protège pas plus d’une année ou que le virus acquiert sur plusieurs années des mutations lui permettant de ne plus être reconnu par une personne qui a déjà fait une COVID ou qui a été vaccinée (comme le virus de la grippe), il sera nécessaire de se vacciner régulièrement avec un vaccin adapté aux nouveaux variants qui pourraient circuler. Cependant, aucune mutation détectée à ce jour n’a affecté la protéine S au point d’altérer la capacité du corps humain à reconnaître le coronavirus.

43. La vaccination peut-elle être utilisée en post-exposition ? .
Aucune étude n’a pour l’instant été réalisée à ce sujet. Compte tenu de la période d’incubation de la Covid-19 (5 jours en médiane) et du délai entre la 1ère dose vaccinale et la protection conférée par les vaccins ARN (10 à 15 jours), la vaccination ne constitue probablement pas une stratégie efficace pour prévenir la maladie de cette exposition particulière. Les personnes ayant eu une exposition connue au SARS-CoV-2 ne devraient pas se faire vacciner avant la fin de leur période de quatorzaine.
Pour les résidents d’EHPAD ou d’USLD, où l'exposition et la transmission du SARS-CoV-2 peuvent se produire de manière répétée pendant de longues périodes, la vaccination est recommandée quels que soient les antécédents d’exposition.

44. L’immunité acquise par l’infection naturelle est-elle plus solide que l’immunité post-vaccinale ? .
La protection qu'une personne obtient en cas d'infection varie d'une personne à l'autre et en fonction de l’infection. Plusieurs études ont montré que de nombreuses personnes n’ont plus d’anticorps détectables quelques mois après une infection bénigne ou asymptomatique. On ne sait pas si ces personnes peuvent ou non se réinfecter. En revanche, les personnes qui ont fait une infection plus grave ont presque toutes des anticorps détectables au moins 6 mois plus tard. C’est pourquoi la HAS a laissé la possibilité de décider au cas par cas si une personne préalablement infectée devait ou non se vacciner.
La vaccination entraîne une immunité qui semble initialement comparable à celles des personnes qui ont fait une forme grave mais on ne sait pas dans quelle mesure cette immunité persiste plus au-delà de 6 mois.

45. Les vaccins à ARNm se font en deux injections. Que se passe-t-il si l’on est exposé au virus après la première injection, et avant la deuxième ? .
Dans l’étude de phase 3 du vaccin de Pfizer-BioNTech, seuls 39 cas de Covid-19 sont survenus entre la première et la deuxième dose dans le groupe des volontaires vaccinés versus 82 dans groupe placebo, indiquant une protection partielle précoce du vaccin dès 12 jours après la première injection. On a donc une forte chance d’être protégé si l’on est exposé au virus avant la 2e dose mais seule une vaccination complète avec 2 doses vaccinales offre une protection de l’ordre de 95 %.

46. Peut-on administrer les vaccins à ARNm par voie sous-cutanée ? .
Non. Le vaccin doit être injecté par voie intramusculaire stricte. Chez les sujets présentant un trouble de l’hémostase ou de la coagulation, ou bien chez les personnes sous anticoagulants, la vaccination peut être faite dans le muscle deltoïde avec une aiguille fine, suivie d’une compression forte et prolongée (2 minutes). Les personnes qui présentent un trouble de l’hémostase ou de la coagulation particulièrement sévère, constituant une contre-indication à l’injection intramusculaire, ne devraient pas être vaccinées, sauf si les bienfaits éventuels l’emportent nettement sur les risques liés à l’administration.

 

Ce document a été élaboré pour le groupe Prévention-Vaccination de la SPILF (Société de Pathologie Infectieuse en Langue Française) par les Drs et Pr Maeva Lefebvre, Olivier Epaulard et Benjamin Wyplosz, et par les Drs et Prs Françoise Ballereau, Elisabeth Botelho-Nevers, David Boutoille, Julie Coutherut, Guillaume Béraud, Jean-François Faucher, Odile Launay, Paul Le Turnier, Jean-Daniel Lelièvre, Zoha Maakaroun-Vermesse, Aba Mahamat, Dominique Salmon, Jean-Luc Schmit, et Nicolas Vignier.